Sucre – La douceur bolivienne… (18 au 20 Juin 2013)

Sucre a représenté notre petite étape « vacances dans les vacances » en Amérique du Sud. Bon, en même temps, ce n’est pas comme si nous y étions restés 10 jours, mais déjà 3 jours de repos nous ont faits du bien !

Sucre est l’une de ces villes qui appelle à la détente…Et puis nous avons été largement aidé par notre entourage. Nous y avons revus tous nos potos de voyage : Alisha et Dany qui y passent 2 mois pour prendre des cours d’espagnol (à notre arrivée, ils y sont déjà depuis 3 semaines) et Laura et Thibault que nous avions rencontré à l’île de pâques. On s’établit donc au même hôtel que Laura et Thibault (Alisha et Dany vivant dans une famille) et nous voici entourés de 2 autres couples de français également que Laura et Thibault ont rencontré au cours de leur périple en Bolivie : Pauline & Paco et Laetitia & Vincent…

Voilà qui va nous faire passer 3 jours entre amis de voyage dans une ville très agréable, à bien manger…De quoi bien se reposer, en effet !

Nous avons donc passé note temps :

A manger…

Tous les matins, le marché nous régalait de par son animation, ses couleurs, ses odeurs, mais surtout, oh oui surtout, ses gigantesques et délicieuses salades de fruits ! C’était un peu la sortie quotidienne, là où nous étions sûrs de retrouver nos acolytes de voyage car, c’est certain, personne ne peut résister à ces merveilleuses salades de fruits ! Il en existe 3 tailles : 6Bolivianos, 8Bs ou 10Bs…Mais on s’est aperçu d’une chose : si le fond change (taille du récipient), elles montent toutes aussi haut formant un vrai château de fruits et de crème…Si tous les stands proposaient la même chose, nous avons quand même élu notre « saladeuse de fruits » préférée ! :-)

Bien que la salade de fruits nous remplissait largement pour le petit-déjeuner, la gourmandise nous forçait, malgré tout, à s’offrir en complément un Saltenas ou un Santa Clara (les Saltenas sont des « chaussons » qui ferment sur le haut alors que les Santa Clara ferment sur le côté : subtile !). Cette merveille n’est rien qu’une sorte d’Empanada à la pâte un peu plus sucrée et fourrée de poulet/légumes…Miam ! Voilà comment se gaver pour 1€ au petit-déjeuner !!!!

 

 

 

 

Se retrouver avec 6 autres français n’est pas chose facile : les conversations sur le manque de fromage, de charcuterie, de bonne bouffe tout simplement vont bon train !!! C’est sûr, notre réputation n’est plus à refaire ! Du coup, ils nous emmènent pour le premier déjeuner au restaurant de l’Alliance française. Le menu du midi nous permet de nous régaler de plats bien cuisinés et très bien présentés à un prix modique : 4,5€ pour une entrée (petite salade très européenne), une soupe (un peu style asiatique : ça dénote), un plat (pour nous, ce sera pièce de bœuf sauce whisky) et un dessert (petite crêpe au Dulche del leche ou glace)….Il est 15h30 quand on sort de table : un vrai repas à la française !

Mais bon, nous avons un budget à respecter et les autres déjeuners/dîner seront plus raisonnables : menu déjeuner à 1,2€, légumes du marché cuisinés dans la cuisine de notre hôtel, hamburgers sur le pouce…Mais nous nous sommes faits une dernière soirée plaisir avec nos amis américains : un poulet piquant cuisiné à la façon bolivienne dans leur famille d’accueil. ‘Piquant’ est un trop faible mot pour définir le niveau d’épice de notre poulet cuisiné !!!! Mais avec une bouteille de vin bolivien, ça passait plutôt bien ! :-)

 

A sortir…

Eh oui, puisque nos amis Alisha et Dany prennent des cours d’espagnol et avaient pas mal d’occupations, nous ne les voyions que le soir…Et eux dans une famille d’accueil et nous dans un hôtel où l’on ne pouvait pas inviter d’étrangers à l’hôtel, il nous fallait nous retrouver le soir, dans des bars…Mais c’est chose aisée à Sucre puisque cette ville estudiantine offre une panoplie très large d’endroits où sortir !

Le premier soir, nous nous retrouvons dans un bar très simple mais à l’ambiance très cosy…

Le deuxième soir, nous mangeons dans un petit restaurant très bon marché à but non lucratif…Mais il nous faut bouger pour boire un coup…Alors en attendant l’happy hour d’un bar hollandais qui ne commence qu’à 21h (bizarre leur horaire d’Happy hours en passant), nous nous rendons (sur les conseils de nos amis français) au ‘petit parisien’. C’est un « bar » (plutôt 2 tables et des chaises dans une sorte d’épicerie) tenu par un vieux français marié à une bolivienne…un vieux con de français pourrions-nous dire…Mais son vin n’est pas cher et ça nous convient bien. Après cette sortie bizarre, on va enfin au bar hollandais pour un cocktail puisque c’est l’heure du 1 cocktail acheté – 1 offert !

Le troisième soir, nous sommes le 19 Juin et…c’est la fête de la musique à Sucre ! Avant l’heure certes, mais le 21 étant la nuit la plus longue de l’année, l’équinoxe, une fête indienne répandue , la fête de la musique se serait largement faite voler la vedette. Mais il faut préciser que ce n’est pas la fête de la musique en Bolivie, c’est juste l’Alliance française qui organise des concerts les 19 et 20 au soir pour honorer cette fête française. Nous voici donc, avant d’aller manger notre « piquante de Pollo »(poulet piquant) à un concert d’un groupe de folklore bolivien. Ça décoiffe. Il faut dire qu’ils ont eu la main lourde sur les réglages au son ! On part après la premier groupe (c’est qu’on a faim) mais après le repas chez Alisha et Dany, c’est l’heure de sortir à nouveau et de profiter d’un nouvel happy hour (de 22h à 23h celui-là !!!)…

Ce qui est sûr, c’est qu’à Sucre, nous aurons eu notre quota de soirée…Nous qui n’étions pas beaucoup sorti jusqu’ici ! En même temps, il faut bien se dire que pour toutes ces sorties, le vin acheté et ce qu’on a mangé en même temps ne nous auront coûté que 9€/personne !!!!! C’est fou la Bolivie !

 A s’instruire…

…Un petit peu, quand même ! Le point fort de nos visites à Sucre sera la ‘Casa de la Libertad’. Cette bâtisse coloniale qui donne sur la place centrale représente le cœur symbolique de la nation, là où fut signée la déclaration d’indépendance du pays, le 6 août 1825. Architecturalement, ce bâtiment blanc est un ensemble de pièces sur 2 étages donnant sur un patio intérieur. Il est beau, mais c’est surtout l’histoire qu’il renferme qui est intéressante. La visite guidée s’est avérée très passionnante, nous en faisant apprendre plus sur l’histoire de la Bolivie. Un petit retour en arrière s’impose…

Sucre, une ville primordiale pour les Espagnols

Vers le 16e siècle, les Espagnols contrôlaient un territoire immense en Amérique du Sud, allant du Venezuela au nord, au milieu de l’Argentine (un peu en dessous de Buenos Aires) au sud. Afin de superviser ce territoire, ils l’ont découpé à plusieurs reprises en différentes provinces. Sucre fut la capitale d’une de ces provinces. En effet, les Incas (ensemble des différentes ethnies d’indigènes peuplant essentiellement la cordillère des Andes) avaient découvert de l’argent à Potosi. Les Espagnols y ont développé l’activité des mines et établi une fabrique de monnaie (cf. notre article sur Potosi, la visite des mines et de la Casa de la Monedad), faisant de Potosi la ville la plus importante de l’Amérique du Sud. Les riches propriétaires (espagnols) de ces mines, ne voulant pas vivre dans le froid à 4300m d’altitude, s’établirent non loin à Sucre et en firent une ville bourgeoise très agréable et cultivée (université, murs peints en blanc à la chaux, etc.). Dans ce contexte, la Casa de la Libertad fut initialement un couvant de jésuites. Cependant, le roi espagnol Charles III répudia tous les jésuites d’Amérique latine, pensant qu’ils implantaient des idées subversives en Amérique latine. Le bâtiment fut alors repris pour être une annexe à l’université de Sucre. Centre d’enseignement, centre économique grâce aux mines, centre du gouvernement local chargé d’administrer une province, Sucre s’est montré être une ville phare pour les intérêts espagnols.

Un esprit de révolte

Au fil de la colonisation espagnole, des dissensions apparaissent au sein de la population d’Amérique du Sud. Il y a désormais  4 ‘classes’ qui disposent de privilèges différents. Dans l’ordre décroissant :
– les Espagnols de pure souche, nés en Espagne, mais venant vivre en Amérique du Sud ;
– les ‘Criollos’, des Espagnols nés en Amérique latine ;
– les ‘Metistas’, des métisses nés du rapprochement d’Espagnols (purs ou criollos) et d’indigènes ;
– les ‘Indigenes’, ben… indigènes quoi.
Les Criollos, nés en Amérique du Sud, ne sont pas attachés à l’Espagne qui leur interdit d’accéder aux postes importants de l’administration. Plus nombreux que les Espagnoles pures souches, ils contrôlent l’économie locale et disposent d’une bonne éducation, à l’image d’un Simon Bolivar, né en 1783 au Venezuela, qui fut envoyé à 15ans en Espagne et en France pour parfaire son enseignement. Or durant cette période, des idées progressistes, post-révolution, parcouraient l’Europe, laissant germer d’autres idées en Amérique du Sud. En 1802, Simon Bolivar retourna en France pour rencontrer les meneurs de la Révolution française puis alla aux Etats-Unis pour étudier le nouveau régime mis en place après la Révolution américaine.  En 1807, il rentra à Carracas, l’esprit plein de théories et d’idées révolutionnaires, pour rejoindre des cercles clandestins militant pour l’indépendance.

Une Espagne dépassée

L’Espagne était alors en pleine confusion. Napoléon mit son frère Joseph Bonaparte sur le trône espagnol. L’Espagne se révolta en 1808 et l’envoi de l’armée française déclencha une guerre d’indépendance. Devant combattre pour leur propre liberté, les Espagnols n’étaient plus en mesure de contrer les mouvements d’indépendance qui surgissaient en Amérique du Sud.
L’embrasement pour l’indépendance
La Bolivie fut la première à organiser une révolte le 25 mai 1809 en proclamant son indépendance. Mais cette révolte s’étouffa rapidement car ses instigateurs, les Criollos, étaient trop peu nombreux.
L’espoir s’élève alors au Sud. Le 25 mai 1810, l’Argentine se révolta et proclama son indépendance sous l’œuvre du général José de San Martin. Ce dernier lança une offensive vers le nord qui libéra le Chili et le nord Argentin, mais fut stoppée nette en Bolivie, aux abords de Sucre…
L’espoir s’élève alors au Nord. Dans le même temps, l’indépendance fut proclamée le 5 juillet 1811 à Caracas. Une longue guerre, sous la tutelle du général Bolivar, va aboutir sur une succession de victoires qui arracheront l’indépendance de nombreux pays des mains espagnoles (bataille de Boyaca – 7 août 1819 – Colombie,  bataille de Carabobo – 24 juin 1821 – Venezuela, bataille de  Pichincha – 24 mai 1822 – Equateur, bataille de Junin – 6 août 1924 – Pérou…
Ironiquement, première à s’être soulevée, la Bolivie sera la dernière à gagner son indépendance.  Le 9 décembre 1824, le maréchal Antonio José de Sucre infligea la défaite finale aux Espagnols lors de la bataille d’Ayacucho, libérant ainsi l’Alto Peru. Cette dernière proclamera son indépendance à l’égard du Pérou le 6 août 1825 à Chuquiasaca (rebaptisée Sucre) dans la Casa de la Libertad : la nouvelle république fut appelée Bolivie.

La Bolivie…

L’indépendance fut proclamée à Sucre, dans la Casa de la Libertad, car celle-ci était une université qui avait des idées progressistes que partageait le premier congrès bolivien. Ce dernier, composé de Criollos à l’exception de 2 métisses, a choisi de nommer cette république Bolivia, sur le même principe que pour la Colombie (Christophe Colombus -> Colombia) ou que Rome (Romu et Romulus -> Roma). De ce fait, la capitale constitutionnelle du pays est Sucre (et non La Paz !). Une guerre intestine entre La Paz et Sucre pour le contrôle du pays éclate plus tard ; La Paz, en vainqueur, va rapatrier tout le pouvoir politique sans consacrer officiellement son statut de capitale. Quant à Bolivar, il sera nommé 1er président de la Bolivie ; mais il n’usera pas de son statut car il quittera le pays après 5 mois. Son successeur est Antonio José de Sucre qui se fera expulsé au bout de 2 ans… Depuis 1825, soit 187ans, ils seront 65 présidents à se succéder, dont 32 dictateurs environ. Instabilité politique, coups d’états et révoltes sont le lot des Boliviens. Quant à leur relation avec leurs voisins, cela ne vaut pas mieux. Ils perdront la moitié de leur territoire au profit du Brésil, du Paraguay et du Chili aux cours de différentes guerres.

La Bolivie aujourd’hui ?

Le président actuel, Evo Morales, est le premier président à être indigène (élu majoritairement au premier tour). Tous étaient jusqu’à présent criollos ou métisses. A noter qu’une femme a été présidente dans les années 50s… pendant 1 an, le temps de se faire renverser. Sinon le président actuel, très populaire, a modifié la constitution en 2009 pour rallonger la durée de gouvernance (5ans au lieu de 4ans) et autoriser une réélection consécutive. Malgré une baisse de popularité en 2009, il a été plébiscité pour se succéder (64%), grâce notamment à la motivation de nombreux défunts qui ont désiré participer au vote ;-). Il effectue ainsi son premier mandat sous cette nouvelle constitution ; nul ne doute qu’il saura convaincre les Boliviens (morts ou pas) de le réélire. Si tel est le cas, il sera certainement l’un des présidents à être resté le plus longtemps au pouvoir (13ans). Quant à son bilan politique, nous ne saurions nous prononcer. Mais ses origines l’amènent tout de même à se pencher sur les conditions déplorables de millions de Boliviens et  à être l’un des premiers présidents à se consacrer à leurs besoins.

 

Voyez comme notre guide a été plus qu’intéressante, nous en apprenant énormément sur l’histoire de la Bolivie et voyez surtout comment nous avons été très bons élèves !!!

Au-delà de cette visite phare, nous nous sommes rendus au musée de l’ethnographie et du folklore qui exposait notamment de très jolis masques…Pourquoi pas.

Et enfin, nous sommes allés au couvent de San Felipe Neri, d’où nous pouvions monter sur le toit pour avoir un beau point de vue sur Sucre: la ville blanche. Quelques gros bâtiments cachent l’étendue mais la vue est jolie et nous pouvons surtout admirer les fameux seins de Sucre !!!

 

 

 

 

A se prélasser….

Ben oui, on avait bien dit qu’à Sucre, nous nous étions reposés !!! Les quelques visites ci-dessus, si elles ont été très instructives, ne nous ont pas pris tout notre temps et  notre hôtel se prêtait très bien à la détente : ciel bleu, arbres remplis de jolis colibris, hamacs, table de ping-pong…et des amis avec qui discuter….

 

Voilà 3 jours à Sucre qui nous ont ravis…mais le voyage continue et il nous faut prendre notre « envol » pour La Paz…